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m'éloigner ; les plus avilissants, les plus accablants de tous les soupçons vont m'y accueillir : mais dona
Mencia est une femme juste, estimable ; votre frère a l'âme noble, je m'abandonnerai à eux. Je serai un
prodige de douceur, de complaisance, d'obéissance, de patience, j'irai au-devant des épreuves."
Elle s'arrête un moment. "Sera-ce assez t'abaisser, malheureuse sylphide ?" s'écrie-t-elle d'un ton
douloureux.
Elle veut poursuivre ; mais l'abondance des larmes lui ôte l'usage de la parole.
Que devins-je à ces témoignages de passion, ces marques de douleur, ces résolutions dictées par la prudence,
ces mouvements d'un courage que je regardais comme héroïque ! Je m'assieds auprès d'elle : j'essaie de la
calmer par mes caresses ; mais d'abord on me repousse : bientôt après je n'éprouve plus de résistance sans
avoir sujet de m'en applaudir ; la respiration l'embarrasse, les yeux sont à demi fermés, le corps n'obéit qu'à
des mouvements convulsifs, une froideur suspecte s'est répandue sur toute la peau, le pouls n'a plus de
mouvement sensible, et le corps paraîtrait entièrement inanimé, si les pleurs ne coulaient pas avec la même
abondance.
O pouvoir des larmes ! c'est sans doute le plus puissant de tous les traits de l'amour ! Mes défiances, mes
résolutions, mes serments, tout est oublié. En voulant tarir la source de cette rosée précieuse, je me suis trop
approché de cette bouche où la fraîcheur se réunit au doux parfum de la rose ; et si je voulais m'en éloigner,
deux bras dont je ne saurais peindre la blancheur, la douceur et la forme, sont des liens dont il me devient
impossible de me dégager ........................... .......................................................................
"O mon Alvare ! s'écrie Biondetta ; j'ai triomphé : je suis le plus heureux de tous les êtres."
Le Diable amoureux 36
Le Diable amoureux
Je n'avais pas la force de parler : j'éprouvais un trouble extraordinaire : je dirai plus ; j'étais honteux,
immobile. Elle se précipite à bas du lit : elle est à mes genoux : elle me déchausse. "Quoi ! chère Biondetta,
m'écriai-je, quoi ! vous vous abaissez ?...
Ah ! répond-elle, ingrat, je te servais lorsque tu n'étais que mon despote : laisse-moi servir mon amant."
Je suis dans un moment débarrassé de mes hardes : mes cheveux, ramassés avec ordre, sont arrangés dans un
filet qu'elle a trouvé dans sa poche. Sa force, son activité, son adresse ont triomphé de tous les obstacles que
je voulais opposer. Elle fait avec la même promptitude sa petite toilette de nuit, éteint le flambeau qui nous
éclairait, et voilà les rideaux tirés.
Alors avec une voix à la douceur de laquelle la plus délicieuse musique ne saurait se comparer : "Ai-je fait,
dit-elle, le bonheur de mon Alvare, comme il a fait le mien ? Mais non : je suis encore la seule heureuse : il
le sera, je le veux ; je l'enivrerai de délices ; je le remplirai de sciences ; je l'élèverai au faîte des grandeurs.
Voudras-tu, mon coeur, voudras-tu être la créature la plus privilégiée, te soumettre avec moi les hommes, les
éléments, la nature entière ?
O ma chère Biondetta ! lui dis-je, quoiqu'en faisant un peu d'effort sur moi-même, tu me suffis : tu remplis
tous les voeux de mon coeur...
Non, non, répliqua-t-elle vivement, Biondetta ne doit pas te suffire : ce n'est pas là mon nom : tu me
l'avais donné : il me flattait ; je le portais avec plaisir : mais il faut que tu saches qui je suis... Je suis le
Diable, mon cher Alvare, je suis le Diable..."
En prononçant ce mot avec un accent d'une douceur enchanteresse, elle fermait, plus qu'exactement, le
passage aux réponses que j'aurais voulu lui faire. Dès que je pus rompre le silence : "Cesse, lui dis-je, ma
chère Biondetta, ou qui que tu sois, de prononcer ce nom fatal et de me rappeler une erreur abjurée depuis
longtemps.
Non, mon cher Alvare, non ce n'était point une erreur ; j'ai dû te le faire croire, cher petit homme. Il fallait
bien te tromper pour te rendre enfin raisonnable. Votre espèce échappe à la vérité : ce n'est qu'en vous
aveuglant qu'on peut vous rendre heureux. Ah ! tu le seras beaucoup si tu veux l'être ! je prétends te combler.
Tu conviens déjà que je ne suis pas aussi dégoûtant que l'on me fait noir."
Ce badinage achevait de me déconcerter. Je m'y refusais, et l'ivresse de mes sens aidait à ma distraction
volontaire.
"Mais, réponds-moi donc, me disait-elle.
Eh ! que voulez-vous que je réponde ?...
Ingrat, place la main sur ce coeur qui t'adore ; que le tien s'anime, s'il est possible, de la plus légère des
émotions qui sont si sensibles dans le mien. Laisse couler dans tes veines un peu de cette flamme délicieuse
par qui les miennes sont embrasées ; adoucis si tu le peux le son de cette voix si propre à inspirer l'amour, et
dont tu ne te sers que trop pour effrayer mon âme timide ; dis-moi, enfin, s'il t'est possible, mais aussi
tendrement que je l'éprouve pour toi : Mon cher Béelzébuth, je t'adore..."
A ce nom fatal, quoique si tendrement prononcé, une frayeur mortelle me saisit ; l'étonnement, la stupeur
accablent mon âme : je la croirais anéantie si la voix sourde du remords ne criait pas au fond de mon coeur.
Cependant, la révolte de mes sens subsiste d'autant plus impérieusement qu'elle ne peut être réprimée par la
raison. Elle me livre sans défense à mon ennemi : il en abuse et me rend aisément sa conquête.
Le Diable amoureux 37
Le Diable amoureux
Il ne me donne pas le temps de revenir à moi, de réfléchir sur la faute dont il est beaucoup plus l'auteur que le
complice. "Nos affaires sont arrangées, me dit-il, sans altérer sensiblement ce ton de voix auquel il m'avait
habitué. Tu es venu me chercher : je t'ai suivi, servi, favorisé ; enfin, j'ai fait ce que tu as voulu. Je désirais ta
possession, et il fallait, pour que j'y parvinsse, que tu me fisses un libre abandon de toi-même. Sans doute, je
dois à quelques artifices la première complaisance ; quant à la seconde, je m'étais nommé : tu savais à qui tu
te livrais, et ne saurais te prévaloir de ton ignorance. Désormais notre lien, Alvare, est indissoluble, mais pour
cimenter notre société, il est important de nous mieux connaître. Comme je te sais déjà presque par coeur,
pour rendre nos avantages réciproques, je dois me montrer à toi tel que je suis."
On ne me donne pas le temps de réfléchir sur cette harangue singulière : un coup de sifflet très aigu part à
côté de moi. A l'instant l'obscurité qui m'environne se dissipe : la corniche qui surmonte le lambris de la
chambre s'est toute chargée de gros limaçons : leurs cornes, qu'ils font mouvoir vivement et en manière de
bascule, sont devenues des jets de lumière phosphorique, dont l'éclat et l'effet redoublent par l'agitation et
l'allongement. Presque ébloui par cette illumination subite, je jette les yeux à côté de moi ; au lieu d'une
figure ravissante, que vois-je ? O ciel ! c'est l'effroyable tête de chameau. Elle articule d'une voix de tonnerre
ce ténébreux Che vuoi qui m'avait tant épouvanté dans la grotte, part d'un éclat de rire humain plus effrayant
encore, tire une langue démesurée...
Je me précipite ; je me cache sous le lit, les yeux fermés, la face contre terre. Je sentais battre mon coeur avec
une force terrible : j'éprouvais un suffoquement comme si j'allais perdre la respiration.
Je ne puis évaluer le temps que je comptais avoir passé dans cette inexprimable situation, quand je me sens
tirer par le bras ; mon épouvante s'accroît : forcé néanmoins d'ouvrir les yeux, une lumière frappante les
aveugle.
Ce n'était point celle des escargots, il n'y en avait plus sur les corniches ; mais le soleil me donnait d'aplomb
sur le visage. On me tire encore par le bras : on redouble ; je reconnais Marcos.
"Eh ! seigneur cavalier, me dit-il, à quelle heure comptez-vous donc partir ? Si vous voulez arriver à [ Pobierz caÅ‚ość w formacie PDF ]

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